L’HISTOIRE VRAIE DE TRULY, NÉE LE 25 MARS 1993 DE PARENTS CONNUS
Elle se prénomme Truly, aurait dû s’appeler Sabine, mais voilà, elle est Anglaise.
Ma taille 1,30 m : Son histoire a commencé il y a bien longtemps, celui qui allait devenir son père adoptif, rêvait, pinceau et tube de colle à portée de main, pour assembler des petites voitures qui allaient nourrir un imaginaire qui les conduirait au- delà du réel. Au cinéma : « Chitty Chitty Bang Bang », son chauffeur Caractacus Potts et sa future femme.
Taille actuelle : moins que celle de Roger Moore, mais suffisante.
Le futur propriétaire, fraichement diplômé, déambule dans les rues de Paris, nous le trouvons rue Froissart. Il s’arrête : qu’est donc cette dame noire, gracieuse, féline, allongée le long du trottoir. Une Continental R ??? Il part, les vitrines suffisent amplement, sans parler des garagistes en figurines et absolument bénévoles.
Taille, la même. Mais sans sa future maîtresse, on le trouve à Deauville, où il s’autorise le type d’hôtel dont ladite maîtresse dévorera le budget. La légitime épouse a commis l’erreur de le laisser livré à lui-même. Il se souvient des paroles de Sabine Paturel : « Je fais rien que des bêtises, des bêtises, quand t’es pas là.... ». Il a loué un scooter, tout de même (sacré flambeur).
Sur le bureau du Concierge dudit hôtel, une pile de grimoires, non le catalogue d’un certain Poulain, une vente de Yearling sans doute ? Un coup de vent soudain, le grimoire s’ouvre page 34, elle apparait, envoûtante.
Hippodrome de Deauville le 12 juillet 2009. Elle est là, la sœur jumelle de celle de la rue Froissart ? Une estimation insultante pour un pareil bijou, un Renoir sur roues.
Allez, une inscription à la vente, cela ne coûte rien. Démarre-t-elle ? Ne sombrons pas dans la vulgarité, regardez-là, cela suffit.
13 juillet 2009. 15 h. L’impétrant, tremblant comme des feuilles de saule, muni de sa pancarte, attend. Ledit Poulain, qu’on appellera désormais Hervé, égrène quelques splendides pouliches. Il annonce une Testa Rossa, qui ne rencontre que du mépris. Un mauvais Godard. Hervé s’offusque : « mais je pensais que les gens avaient de l’argent, ici ? ». En vain.
Le lot 31 arrive. C’est elle, la Continental R 1993. L’enchère démarre. Celui qui ne fait pas tout à fait la taille de Roger Moore lève sa pancarte. Silence. Que se passe-t- il ? Un sentiment de malaise l’envahit, Sabine Paturel fredonne : « J’ai tout mangé le chocolat, j’ai tout fumé les Craven A... ».
Il appelle le banquier : mais enfin, vous n’allez pas vider vos comptes ? Et votre compte-joint ? Le banquier larmoie. Trop tard.
Et ME voilà de retour à l’hôtel. J’ai perdu la transparence conférée par mon scooter. Le Directeur, obséquieux, me remarque et m’interpelle, affable : « Vous ne restez que trois jours parmi nous, quel dommage ! ».
Le jour du retour. Une station-service – oui elle boit, sans la moindre modération et pas de la piquette ; je suis interpellé par une jolie blonde en Mini – pas jupe !! – « Le bouchon de mon réservoir est bloqué, pouvez-vous m’aider ? -voix chaude, du Sofia Loren - J’ai reconnu votre voiture, vous étiez à l’Hôtel... ? ». Passons sur cette histoire, CENSURE, plus de budget Blonde.
Arrivée à Paris. « Allo, Marie, peux-tu descendre, j’ai quelque chose à te montrer ». Réponse cinglante : « impossible, je ne suis pas prête ». Réplique : « Si Cary Grant était en bas, tu descendrais ? M. : « Bien-sûr ». PH : « Alors descend ». Les jumelles s’installent à l’arrière, déjà chez elles. Marie ne me croit pas, ou si, je lui montre la facture et elle prend la mesure de ma folie.
Me voici parvenu à l’entrée d’un populaire parking public. J’aborde avec terreur la rampe étroite. A chaque frottement des pneus, l’eau monte, alimentée par ma sueur.
Elle s’appelle Truly, mais si, la Truly Scrumptious de « Chitty Chitty Bang Bang », rappelez-vous, la voiture magique.
Voilà, c’est notre histoire, plus de dix ans ont passé, déjà. La famille s’est agrandie, la belle est aimée, choyée, adoptée. Elle nous a fait vivre de merveilleuses aventures et permis de croiser tant de personnes passionnantes.
Le 5 avril 2020, confiné, me voici avec mes vitrines et mes rêves intacts. Les portes de la cage aux oiseaux sont grandes ouvertes : merci Sabine, merci Pierre [Perret].
Pierre-Henri Hanoune Avril 2020