Croyez- vous aux miracles ? Non... eh bien vous avez tort !
Je vous explique : Jean rêvait d’une Rolls. Je lui ai offert un modèle réduit de chez Dinky- Toys en lui disant « si tu l’arroses souvent, un jour elle deviendra grande » !

Vous êtes tous témoins que ce miracle a bien eu lieu !

Cette envie de Rolls-Royce avait commencé vers les années 1977 alors qu’un jour de pluie en vacances aux Sables d’Olonne nous étions partis visiter le musée de l’automobiles de Talmont. Jean était tombé en pâmoison devant une superbe Silver Cloud. Le directeur du musée, un copain, lui avait affirmé que c’était le moment d’acheter ce genre de voiture car elle se négociait au creux de la vague. L’ennui quand nous avons acheté la nôtre, la tempête s’était levée et les vagues n’avaient plus de creux. Mais j’anticipe...

Revenu de vacances, Jean achète le Figaro ayant été prévenu qu’on pouvait y lire un article concernant notre fille. Je ne sais pas s’il a lu cet article mais je peux vous assurer qu’il a lu les petites annonces automobiles et qu’il est tombé sur cette annonce : Rolls- Royce première main, téléphone etc...

Inutile de préciser qu’il appelle ce numéro dans les secondes qui suivent. Un monsieur charmant lui explique que c’est la voiture de Louis Pauwels et qu’il en veut tant. Devant l’étonnement de Jean, ce monsieur lui explique qu’on en a toujours pour son argent et que lui-même pour faire des économies avait voulu acheter sa maroquinerie chez Céline et qu’il était vite retourné chez Hermès. Plus snob tu meurs !!

Jean n’a pas fait d’économie et a succombé à la tentation. Je suis témoin qu’il a bien fait car, de ce jour, nous avons vécu des moments inoubliables. Inscription au RREC, Ludo Pivron était le président de la section française à cette époque et c’est avec condescendance qu’il a inscrit notre Silver Cloud trouvant ce modèle bien trop récent. Les temps ont bien changé !

La section française était pratiquement inexistante et Jean a pris en main l’organisation de cette nouvelle passion. Bulletin mensuel, Club Shop, Rallyes... Moi bien sûr je me suis lancée avec Jean dans l’action et chaque mois j’ai rédigé le « Journal des dames et des demoiselles », tenu le stand à Rétromobile. Tiens, je ne sais plus en quelle année un grand monsieur se présente sur le stand pour me demander des renseignements sur le club, il me dit vouloir s’inscrire... OK mais au moment de payer la cotisation il me déclare avoir oublié son carnet de chèques dans sa voiture. « Je reviens, me dit-il » Dans ma tête, je pense que le coup du carnet de chèques, c’est râpé comme excuse. Eh bien je me trompais : ce grand monsieur, c’était Jean Lafargue qui fut longtemps notre président et son épouse, Andrée, en est maintenant vice-présidente !

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Lorsque Jean a dû remplir sa feuille d’impôts il s’est trouvé devant un problème, il fallait déclarer les voitures mais pas les collections... or la Silver Cloud est une voiture de collection, oui mais qui dit collection sous-entend un certain nombre d’objets ?
Le percepteur interrogé est resté coi et nous a conseillé de ne pas la déclarer ! Nous avions donc une voiture de collection sans collection...

Jean a vite corrigé cette anomalie en achetant une deuxième Rolls, une Silver Wraith 1954. J’ai adoré cette voiture, majestueuse avec ses gros phares. Cette merveille avait une carrosserie HJ Mulliner, à l’arrière un meuble-cabinet avec trois carafes en cristal, quatre verres à whisky, quatre verres à porto (moi qui ne bois que de l’eau, j’étais malgré tout en extase...), une boîte à biscuits...

Jean a toujours pris un soin jaloux de ses voitures, il appelait la Cloud la petite et la Wraith la vieille et quand il disait « je sors la petite » il ne parlait pas de sa fille et quand il disait « je sors la vieille » j’ose espérer qu’il ne parlait pas de moi !

Je me souviens d’un rallye à Cabourg en 1981, apparemment ce n’était peut-être pas la meilleure année, nous avions une légère appréhension mais comment résister à une municipalité qui nous offrait le gîte et le couvert au Grand Hôtel en échange d’un concours d’élégance sur la promenade Marcel Proust ? 

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Cette année-là, nous avions vendu des billets de tombola donnant le « privilège » à certains gagnants de faire un petit tour en Rolls. Jean se retrouve avec à son bord un père et son fils. Le monsieur en bleu de travail retire sa caquette et s’installe à l’arrière avec son gamin d’une douzaine d’années. Seul petit inconvénient : le gosse est mongolien et trouve très amusant d’appuyer sans arrêt sur le bouton de commande de la glace électrique... Jean, fair-play, mais souffrant dans sa chair, n’ose pas intervenir. Le gamin s’écrie « on va aller montrer la voiture à Maman ». OK dit Jean et c’est par où ?

Le père l’entraine dans des petites ruelles jusqu’à une impasse où la Rolls a du mal à entrer ; au fond, sur le pas de la porte une brave femme en tablier voit s’approcher la voiture... Le gamin ouvre la vitre et hurle « Maman on a gagné ! ». La pauvre mère atterrée lève les bras au ciel en s’écriant « mais qu’est-ce qu’on va faire de çà ? »

Des anecdotes je pourrais vous en raconter des dizaines comme la fois à Saint Tropez où des anglais en Rolls décapotable ont fait tout le rallye avec nous alors que nous ne les connaissions pas !

Le temps a passé et nous sommes encore quelques-uns de ces jours anciens : Andrée Lafargue toujours belle et élégante. La non moins jolie Jo Levar qui avec son mari Camille a fourni chaque mois les photos du bulletin et Dana... quel beau souvenir quand pour la première fois nous avons vu arriver ce couple fantastique, elle, belle et flamboyante, lui, magnifique avec ses longs cheveux en queue de cheval, tous deux si élégants dans l’originalité. Et puis Jean-Philippe Sécordel-Martin... il devait avoir 15 ou 16 ans, pas de permis mais déjà une Rolls offerte par sa grand-mère ! Quelques-uns encore, vieux amis, qui ont connu Jean.

Merci à ceux qui continuent à donner vie à cette belle aventure...

Mai 2019